« Elle souffre d’automatismes mentaux », le diagnostic tombe enfin. Il vient poser des mots sur une souffrance visible mais qui était restée indéchiffrable. Il vient dire que ce qui passait pour une fragilité, une tendance à la dépression était en fait une maladie. Elle est malade. Ce n’est pas de sa faute, c’est la maladie. Le diagnostic change la perception de l’autre. Tout à coup, on attribue à la maladie les comportements compulsifs, les sentiments de persécution, les voix qui l’oppressent. Elle ne veut pas prendre son médicament, c’est la maladie. Tout s’explique enfin. Hélas, la maladie finit par faire écran, car elle vient révéler une réalité à laquelle on ne parvient pas à accéder. Un monde à part, dont on ignorait l’existence.
La maladie que l’on prenait pour une réponse est, en fait, un masque de plus, une porte qui s’ouvre sur une autre porte, révélant durement nos défaillances individuelles et collectives face aux troubles mentaux. Pourquoi est-on si démuni face à un proche atteint d’une pathologie psychiatrique ? Peut-on juger une société à la façon dont elle regarde ses fous ?
« Elle souffre d’automatismes mentaux », le diagnostic tombe enfin. Il vient
poser des mots sur une souffrance visible mais qui était restée
indéchiffrable. Il vient dire que ce qui passait pour une fragilité, une
tendance à la dépression était en fait une maladie. Elle est malade. Le
diagnostic change la perception de l’autre. Tout à coup, on attribue à la
maladie les comportements compulsifs, les sentiments de persécution, les
voix qui l’oppressent. Elle ne veut pas prendre son médicament, c’est la
maladie. Tout s’explique enfin. Hélas, la maladie finit par faire écran, car
elle vient révéler une réalité à laquelle on ne parvient pas à accéder. Un
monde à part, dont on ignorait l’existence.
La maladie que l’on prenait pour une réponse est, en fait, un masque de
plus, une porte qui s’ouvre sur une autre porte, révélant durement nos
défaillances individuelles et collectives face aux troubles mentaux.
Pourquoi est-on si démuni face à un proche atteint d’une pathologie
psychiatrique ? Peut-on juger une société à la façon dont elle regarde ses
fous ?
Il y a eu, alors, ce besoin d’approcher la maladie autrement que par la science et la raison, le désir de ressentir ces autres réalités, de trouver une autre porte. Mes premières constructions ont porté sur le motif de la répétition (ou sur la répétition d’un motif) et sur celui de l’enchevêtrement de fragments d’images pour signifier l’entrelacement des réalités. L’objectif était double, faire transpirer l’idée que j’ai de son mal être, mais aussi mon malaise vis-à-vis de mon incompétence et de mon impuissance à la libérer de l’emprise de la maladie.
RÉALITÉ(S) commence au seuil de cette porte.
« Avec ce projet, je continue mes recherches autour de l’ambiguïté, de la fragmentation, de la recomposition, de la déformation et de l’altération des images. »
J’ai eu, alors, ce besoin d’approcher la maladie autrement que par la science et la raison, le désir de ressentir ces autres réalités, de trouver une autre porte. Mes premières constructions ont porté sur le motif de la répétition (ou sur la répétition d’un motif) et sur celui de l’enchevêtrement de fragments d’image pour signifier l’entrelacement des réalités. L’objectif était double, faire transpirer l’idée que j’ai de son mal être, mais aussi mon malaise vis-à-vis de mon incompétence et de mon impuissance à la libérer de l’emprise de la maladie.
RÉALITÉ(S) commence au seuil de cette porte.
« Avec ce projet, je continue mes recherches autour de l’ambiguïté, de la fragmentation, de la recomposition, de la déformation et de l’altération des images. »
Mêlant, à part égale, art photographique, art plastique et art sonore, je cherche avec ce projet à créer des immersions visuelles et sonores qui plonge les visiteurs dans un monde à la fois étrange et familier. Des images qui s’entrelacent, qui se dédoublent pour signifier une agitation intérieure : l’esprit qui déborde du corps ou le corps qui déborde d’esprits. Des transferts de fragments photographiques sur des feuilles de plombs, du plexi ou des feuilles transparentes pour montrer sans dévoiler, pour faire émerger une réalité glissante, difficile à saisir. Des nuques et des fragments de corps pour ne pas donner de visage à la folie, mais au contraire permettre à chacun de s’y retrouver quelque part. En dialogue avec le travail visuel, la création sonore de l’exposition réalisée avec Chrystèle Bazin donne à entendre une multitude de paroles, couturant ensemble des fragments d’histoires et de vie jusqu’à produire un voyage audiographique dans les altérations mentales. Le parcours de l’exposition, pensé pour être évolutif et modulaire, se construit autour de motifs : la famille, la parole, les souffrances mentales, les crises, vivre, etc.
Réalité(s) fait suite à une résidence artistique au centre Saint-Thomas de Villeneuve, à Aix-en-Provence, un EPHAD qui possède une unité d’accueil de troubles psycho-comportementaux sévères. Pendant six mois, je me suis immergée dans le lieu avec les résidents, les équipes soignantes et les animateurs pour étendre mon exploration des altérations mentales : la façon dont elles se traduisent sur le corps, mais aussi la façon dont l’altération du corps peut symboliser ou représenter, dans mon regard, l’altération mentale. Le projet artistique s’appuie également sur une seconde résidence artistique à la Cabane Georgina à Marseille qui a permis de construire la première itération de l’exposition Réalité(s) en mai 2022 dans ce même-lieu. Enfin, le projet se construit au contact des personnes malades et des proches à travers des ateliers d’expression et de création artistique avec des personnes malades et des proches. Je m’imprègne, ainsi, des corps, des regards, des voix, des mots, des pensées, des histoires de vie de toutes ces personnes.